Actions

Work Header

Femme et mère

Summary:

Quand Arya revint à Winterfell, elle portait un bébé de quelques mois. Son bébé. Un bébé qu'elle voulait abandonner aux soins de sa sœur aînée.

Notes:

TU PEUX TOI AUSSI COMMANDER TA FICTION

Oui tu peux toi aussi commander une fiction en te rendant sur notre histoire "Commandes de fictions" ou sur notre forum (sur ff net), et review le mois en cours ! Ou bien via une de nos histoires sur A03!

Hé ! Bien le bonjour (ou le bonsoir) à toi qui arrive sur cette histoire ! Prims . pop nous a demandé une fanfiction post saison 8 où Arya, qui est tombée enceinte suite à sa première fois avec Gendry, vient confier sa fille à Sansa, laquelle fera tout pour convaincre sa soeur de rester aux côtés de son enfant.

Marina Ka-Fai, une des auteurs de notre collectif, a décidé répondre à cette commande.

Disclaimer : Game of Thrones est l'oeuvre de George R.R Martin et de David Benioff ainsi que de son compère Daniel Brett Weiss. Parce que sinon, si c'était mon œuvre, Lancel serait un enfant magique prophétisé pour apporter un été éternel à Westeros, il aurait plein d'enfants et serait heureux.

Work Text:

Au début, elle avait pensé ses nausées passagères. Le changement de climat, la nourriture différente. Elle n'avait pas prêté attention à l'arrêt de ses menstrues, trop prise par ses études de cartes, l'excitation de la découverte, le frisson de l'aventure. Et puis, au fond, les douleurs qu'elles causaient ne lui auraient pas spécialement manqué. Non, là où Arya commença à réaliser son état, ce fut quand son ventre commença à poindre, une très légère bosse au niveau du ventre, assez petite pour être cachée mais assez tendue et dure pour s'en inquiéter. L'idée d'une grossesse lui traversa l'esprit et la glaça bien plus que les doigts du Roi de la Nuit sur son cou avant qu'elle ne le poignarde. Non, ce ne pouvait pas être ça, tout mais pas ça ! Elle ne pouvait pas être une mère ! Ce n'était pas sa vie, ce n'était pas ce qu'elle voulait, ce n'était pas elle ! Une peur panique s'empara d'elle et elle sentit le sol se dérober sous ses pieds, sachant pertinemment que tous ceux à qui elle en parlerait lui diraient, la bouche en cœur, combien c'était merveilleux de porter puis de donner la vie, de l'élever pour en faire une nouvelle âme qui foulerait le sol de la terre. Une extension d'elle, son héritage, son sang, son nom. Ils ne comprendraient jamais ses peurs. Et quel avenir offrir à ce petit être ? Un bébé ne pouvait pas être élevé sur un bateau et elle craignait qu'en abandonnant son rêve pour se consacrer à lui, elle ne finisse par lui en vouloir alors qu'il était innocent dans tout cela. Elle envisagea un instant le thé de lune avant de se raviser, éternelle pragmatique :

Sansa.

Sansa était la reine du Nord.

Une reine sans époux, sans héritier.

Une reine qui avait le pouvoir de légitimer son bâtard pour qu'il puisse lui succéder plus tard.

Oui, c'était sans doute la meilleure chose à faire, la chose la plus juste pour tous.


Quand on annonça Arya dans la salle du trône, le cœur de Sansa bondit dans sa poitrine. Elle ne s'attendait pas à un retour si rapide mais cela l'enchantait ! Elle lui avait manqué et elle pensa à leurs parents qui auraient été si heureux de les voir s'entendre enfin. Elle se leva, prête à courir pour l'enlacer, faisant fi de ce qu'on aurait pu dire d'elle en cet instant. Cependant, quand elle la vit, elle se figea, stupéfaite :

Dans les bras de sa cadette, un bébé qui ne devait pas avoir plus de six mois.

Elle demanda à leurs gens de sortir, pressentant quelque chose d'important contenu pourtant dans cet être si petit et si fragile. Une fois entre elles, elle s'approcha.

- Arya...

Elle n'osa pas demander si cet enfant était le sien, les circonstances entourant sa naissance et ce qui avait poussé sa sœur à la mener à terme malgré ses sentiments bien clairs sur la maternité. La plus jeune sembla le deviner car elle prit la parole.

- Voici Catelyn. Ma bâtarde.

Sa voix se voulait volontairement détachée, neutre, froide. La reine sourit doucement cependant.

- Puis-je la porter ? Demanda-t-elle

Elle la souleva avec délicatesse et caressa du bout du doigt sa joue rose. Elle avait un duvet noir, des grands yeux bleus, une peau pâle.

- Elle est magnifique, Arya ! Félicitations ! Bonjour, Catelyn ! Je suis ta tante Sansa. Et tu es à Winterfell. Là où tous les Stark, de nom comme de sang, doivent être.

- Tu as changé d'avis sur les bâtards alors. Plaisanta Arya

- J'ai grandi, j'ai vécu deux guerres, je crois que cela vous change une femme. Riposta gentiment Sansa

Elles s'assirent près du feu, la souveraine portant toujours sa nièce.

- Quel âge a-t-elle ?

- Sept mois.

La jeune femme la berça doucement. L'exploratrice les observait, voyant combien cela semblait naturel pour son aînée, combien elle l'aimait déjà, justifiant un peu plus son choix malgré la douleur qu'il lui imposait.

- Je viens pour te la confier. Révéla-t-elle

- Pardon ? Dit la dirigeante en relevant la tête

- Je ne reste pas. Je te la confie. Et si tu ne peux pas, elle a un père chez qui je peux la laisser.

- Je... Je ne comprends pas, Arya... Tu... Tu abandonnes ta propre fille ?

- Abandonner est un peu fort, non ? Puisque je la confie à un membre de sa famille.

- Mais elle a besoin de toi !

- Elle est sevrée. Je l'ai nourrie moi-même.

- Son père sait-il qu'elle existe ?

- Non. Car il me demanderait à nouveau de l'épouser, ce que je refuse. Je ne suis la femme de personne. Je n'obéis à aucun homme et aucun homme ne pourra me forcer à me soumettre à un carcan que je déteste.

Gendry. Evidemment. Les couleurs de la petite auraient dû la mettre sur la voie pourtant.

- Un bébé n'a pas sa place sur un bateau, encore moins dans une aventure comme la mienne. Poursuivit l'aventurière. C'est dangereux, je ne peux pas la protéger comme elle le mérite et je refuse de sacrifier mon rêve parce que j'ai porté un être humain dans mes entrailles. Je n'ai jamais voulu être une mère.

- Et malgré tout, tu en es une. Tu agis comme une mère. Penser à sa sécurité, à son confort, n'est-ce pas là un signe que tu en es une ? Tu l'as mise au monde. Tu l'as baptisée. Tu lui as donné le nom de notre mère. Tu l'as nourrie toi-même et tu l'as amenée ici. Si ce n'est pas être une mère, alors qu'est-ce que c'est, Arya ?

Elle ne répondit pas. La lady régnante reprit :

- Ta fille, ma nièce, est la bienvenue ici. Elle est une Stark en tout sauf en nom. Sa place est ici et je serai ravie de l'avoir à mes côtés, de veiller sur elle pour toi. Mais Arya, ne risques-tu pas de le regretter ? Tu vas tout manquer ! Ses premiers pas, ses premiers mots, ses premiers sourires !

- Arrête ! Je sais ce que tu essayes de faire ! Je ne peux ni ne veux être une mère ! Le sacrifice demandé est trop grand et je ne veux pas le payer ! Crois-tu que je n'ai pas pensé à tout cela ? Que cela ne me fait rien ?! C'est la seule solution pour que tout le monde soit heureux ! Je continue ma vie, tu as un héritier, elle est élevée dans l'amour ! Parce qu'abandonner ma quête pour elle, malgré tout l'amour que j'ai pour elle, je sais que cela n'apportera rien de bon ! Je vais devenir frustrée, aigrie, reporter ça sur elle alors que ce n'est pas de sa faute ! Une femme doit-elle forcément s'effacer dès qu'elle met bas ?!

Catelyn, effrayée par l'éclat de voix, se mit à geindre, vite consolée par les bras de la reine.

- Arya... Tu es ma sœur, je suis de ton côté, je te soutiens. J'ai juste peur que tu ne fasses une erreur qui te fera souffrir encore plus. Imagine si jamais ta fille venait à m'appeler Maman ? A me voir comme sa mère même si je venais à la corriger à chaque fois ? A t'appeler Arya alors que tu es plus que cela ?

- Crois-tu que je n'y ai pas pensé ?

Le silence se fit, perturbé par les crépitements du feu dans l'âtre avant que Sansa ne semble prise d'une épiphanie.

- J'ai peut-être une idée. Mais écoute-moi sans m'interrompre.

Arya acquiesça.

- Reste ici quelques années. Peut-être jusqu'à ses cinq ou six ans. Je sais, cela te paraît long. Mais ainsi, Catelyn grandira à tes côtés et quand tu partiras pour découvrir ce qu'i l'ouest de Westeros, elle aura des souvenirs de toi. Elle saura à quoi tu ressembles, le son de ta voix, la chaleur de tes bras. Tu ne seras pas qu'un nom, qu'un portrait, une signature sur une lettre. Tu seras sa mère, elle t'appellera Maman et tu accompliras ton rêve tout en la sachant en sécurité. Et rien ne t'empêche de travailler d'ici, avec des cartes, des correspondants ! Je légitimerai ta petite, personne ne la regardera de haut et je ne laisserai personne la traiter comme j'ai pu injustement traiter Jon jadis.

Voyant que cela la travaillait, elle ajouta qu'elle n'avait pas à lui dire sa réponse tout de suite, elle devait être épuisée par son voyage.

- Cependant... Gendry doit savoir, Arya. Tu n'as pas à l'épouser si tu ne le veux pas. Et si je ne le connais pas beaucoup, j'en sais assez pour savoir qu'il respectera ton choix. Mais ce serait mal, ce serait criminel, de ne pas lui dire qu'il a une petite fille aussi adorable. Ne le laisse pas être ton époux si ce n'est pas ce que tu veux mais laisse-le être un père pour Catelyn car elle le mérite.


Sept ans plus tard.

Sur le port, Arya embrassait une dernière fois sa fille. Elle avait accepté le compromis de Sansa et elle devait avouer qu'elle avait la sensation d'avoir fait le bon choix. Catelyn était tout ce dont une mère rêvait : une petite fille sage, intelligente, gentille et, dans le cas de la jeune femme, avec cette petite étincelle de rébellion. Elle maniait l'aiguille aussi bien que l'anelace. Gendry l'enlaça, lui souhaitant bonne chance avant de prendre leur enfant dans ses bras. Il avait tenu à venir pour la voir voguer et avait financé une partie de l'exploration, seule preuve d'amour sans attache et sans engagement qu'il pouvait lui donner. Il n'avait jamais redemandé sa main mais son affection demeurait, fidèle, sincère, l'acceptant toute entière. Elle en éprouvait du remords. Il méritait bien mieux que ce qu'elle lui offrait.

- Tu m'écriras, dis ? Demanda la fillette

- Bien sûr ! Répondit-elle Et je compte sur toi pour me raconter tout ce qu'il se passe à Winterfell comme à Accalmie ! Tu seras mes yeux ici et moi les tiens là-bas. Sois bien sage avec ta tante Sansa et avec ton père. Tu dois leur obéir comme tu m'obéis.

- Sa Majesté et moi-même veillerons bien sur elle, tu as ma parole. Promit Gendry

- Tu n'as pas besoin de me le promettre. Je le sais. C'est pourquoi je pars le cœur tranquille.

Elle monta à bord, les salua de la main avant qu'ils ne finissent par disparaître dans l'horizon, de minuscules points au loin. Elle huma l'air marin, apaisée, la réponse à sa question qui la tourmentait depuis des années enfin arrivée jusque dans son esprit :

Non, quand une femme mettait au monde un enfant, elle ne devait pas automatiquement s'effacer pour devenir une mère.

Elle évoluait simplement, étant un mélange des deux, quand elle avait la chance d'être soutenue comme elle l'était et peut-être qu'un jour, des décennies, des siècles, des millénaires plus tard, cette leçon serait si évidente pour tout le monde que jamais plus une femme n'aurait à souffrir de ce dilemme interne.

FIN